
Dans un village perdu des Pyrénées (sans doute puisque l’auteure est familière des lieux, mais en vrai ce village n’est pas situé) vivent, encore plus isolés, Mariette et son fils. Celui-ci, surnommé l’Ours pour son physique impressionnant, est un jeune homme qu’on dit inadapté. Mais il possède un don, celui de guérir les bêtes. Dans ces montagnes, un randonneur a aperçu une fillette, nue qui jouait avec un âne. Et il a prévenu la police qui a arrêté l’Ours qui serait coupable. Mais coupable de quoi ? De prendre soin d’une fillette qu’il élève en secret dans les montagnes ? D’avoir enlevé cette enfant ? De l’avoir soustrait à la société des hommes ? Au fil des pages, les habitants des lieux vont prendre la parole tour à tour, y allant de leurs commentaires, interprétations et théories diverses au sujet de ce trio.
Ce court roman d’à peine 150 pages se lit d’une traite. Chaque témoignage, tantôt bienveillant, tantôt accusateur, parfois moralisateur ou porteur de médisance ajoute une pièce au puzzle de l’histoire de Mariette et de son fils. Ainsi, de déposition en déposition (car il s’agit bien de personnes convoquées par la police pour comprendre d’où vient et qui est cette fillette), le lecteur se rapproche d’une certaine vérité. Qui n’est probablement pas l’entière ni la vraie vérité mais finalement là n’est pas complètement le sujet.
“ Devant l’institutrice qui, je vous le répète, n’était pas une tendre, elle l’a embrassé, lui, son fils, notre idiot de l’école. Et elle ne l’a pas embrassé vite fait, sans y penser, par habitude, non, elle l’a embrassé avec une application et une lenteur incroyables. Ce baiser de mère, moi il m’a bouleversé. Vraiment. Un pareil amour entre une mère et son fils, je n’avais jamais vu ça. Je ne savais pas que c’était possible.”
Il est ici plutôt question de comprendre la différence, d’accepter l’autre quand la société pousse plutôt à poser des normes et à définir précisément ce qui est conforme ou non. A travers les différents personnages qui prennent la parole apparaît le portrait d’un homme que sa mère a voulu protéger et qui s’est épanoui dans la nature et auprès des animaux. Dans ces lieux où personne ne porte de jugement et où les bêtes lui accordent leur entière confiance. Ces lieux que Mariette a pensé comme un refuge lorsqu’elle a compris que son fils n’entrerait jamais dans des cases prédéfinies et qu’il faudrait le soustraire au besoin de normalité d’une société qui ne sait pas accueillir les êtres différents. Un endroit où finalement, et globalement, ils avaient trouvé apaisement et bienveillance de la part de nombreux habitants avant que tout n’explose avec la signalisation, par une personne extérieure à leur communauté, de la présence de cette mystérieuse fillette.
Le récit est émaillé par une petite comptine, celle des fées desquelles la légende raconte qu’elles sont là pour prendre soin des enfants que des mères leurs confient lorsqu’elles ne peuvent pas s’en occuper.
C’est un roman à la fois plein de poésie, très intense et dont les dernières pages constituent un ultime choc pour le lecteur déjà bien secoué.
Comme des bêtes – Violaine Bérot (Editions Buchet-Chastel – avril 2021)
Je n’ai pas encore osé le lire, mais je tourne autour depuis sa sortie.
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Franchement c’est un beau roman
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