Azincourt par temps de pluie de Jean Teulé

Une hécatombe, une catastrophe, une déculottée telle qu’on en voit peu ! Voilà ce qu’est la bataille d’Azincourt pour la France et son roi Charles VI, absent du champ de bataille pour cause de maladie mentale. Et pourtant, ils y croyaient les Français à cette victoire facile. Pensez donc : plus de 10 000 hommes armés, cuirassés, frais et dispos contre moins de 8 000 affamés, déguenillés, malades. Oui mais voilà, la météo vous joue parfois de ces tours ! C’est que le déluge s’est abattu sur la région en ce 25 octobre 1415. Que les armures, c’est joli, ça protège mais c’est lourd aussi. Pour les hommes comme pour les chevaux. Et qu’à force de poireauter pour aller leur mettre la pâtée aux rosbifs, eh bien on s’est enfoncé dans la boue et on ne peut plus bouger un orteil. Et voilà nos français devenus des cibles parfaites pour les soldats d’Henri V qui ne feront qu’une bouchée de tous ces nobles si fiers de leurs bannières et de leurs couleurs.

“ Des flèches pénètrent dans les défauts des armures. Lorsque l’angle est bon et que c’est de face, les tirs tendus traversent les plastrons de haute renommée. Qualité allemande, qualité allemande… à cette distance, une flèche, ça entre quand même. Si l’angle est trop ouvert, le projectile ricoche sur de l’acier milanais pour aller planter le voisin et c’est malgré tout gagné, mais les Français ne bougent toujours pas ! Les Anglais en sont sciés. Même chez des gens pourtant venus du pays du flegme, ça épate.”

Evidemment, sous la plume de l’inimitable et tellement regretté Jean Teulé, cette bataille d’Azincourt, à défaut d’être une page historique à la gloire de la France, devient un monument de drôlerie et de truculence.

On y est, les deux pieds dans la boue, et on les voit tomber les uns après les autres les glorieux chevaliers, orgueilleux et butés. De plus jeunes au plus vieux, du plus novice au plus expérimenté pas un ne peut échapper à la boucherie et à la vindicte de ces anglais qui ne voulaient finalement que rentrer chez eux.

Jean Teulé manie la langue avec maestria, mélangeant les genres, alternant les phrases aux doux accents de “vieux françois” et celles totalement actuelles, y allant de son commentaire percutant et plein d’ironie.

Un roman jubilatoire qui ne fait que renforcer l’idée que nous avons perdu un grand écrivain, capable d’une fantaisie inégalée et maîtrisant à la perfection l’art de la satire. Replongeons-nous dans les écrits de Jean Teulé sans plus tarder ! 

Azincourt par temps de pluie – Jean Teulé (Editions Mialet-Barrault – février 2022)

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