Un homme presque parfait de Richard Russo

Donald Sullivan, dit Sully, la soixantaine, habitant de North Bath, est au chômage à la suite d’un accident du travail qui lui a laissé un genou en très mauvais état. Il n’en continue pas moins de travailler au gré des chantiers qu’on veut bien lui confier car il est aussi, chroniquement, à cours d’argent. Divorcé, père d’un fils qu’il ne voit pour ainsi dire jamais et avec lequel il entretient des relations plus que distantes, Sully semble concentrer sur lui un bon nombre de problèmes ! Le retour de son fils, Peter, à North Bath est peut-être pour Sully l’occasion d’un nouveau départ.

Ce récit fait près de 800 pages et pourtant, à aucun moment on ne sent de lassitude ou l’envie de passer des pages ! Un tour de force dont Richard Russo est coutumier et qui ne nous surprend plus. Cet auteur possède une rare habileté à maintenir l’intérêt grâce à un savant mélange d’humour, de personnages attachants et de rebondissements judicieusement distillés.

Rien de trop, donc, dans ce récit qui met en scène un sexagénaire un brin blasé, pas très doué dans ses relations mais chez qui l’on sent rapidement poindre une profonde humanité et une certaine empathie qui ne demanderait pas grand-chose pour s’épanouir.

“Après tant d’années, elle aurait dû au moins savoir que Sully était plus doué pour améliorer un moral déjà au beau fixe qu’à vous sortir de votre cafard. C’était un homme bien trop honnête pour aider son prochain à se sentir mieux, si celui-ci n’en était pas capable lui-même.”

Aux côtés de Sully, Richard Russo donne vie à une galerie de personnages un poil déjantés, atypiques, surprenants mais qui forment une communauté solide. On fera ainsi la connaissance de Beryl Peoples, ancienne institutrice, chez qui loge Sully, à l’esprit caustique et qui entretient des conversations avec son défunt mari et un masque africain qui trône dans son salon. Clive, le fils de Beryl, qui fonde tous ses espoirs sur un projet de parc d’attractions qui devrait voir le jour à North Bath. Rub, acolyte inséparable et souffre-douleur de Sully. Carl Roebuck, entrepreneur moyennement honnête et époux volage avec qui Sully cultive un rapport amitié-haine ancien.

Et encore bien d’autres personnages qui constituent la population disparate de cette ville américaine perdue au fin fond du New Jersey.

C’est un récit plein d’un humour caustique, d’une véritable tendresse pour les personnages qu’il met en scène, d’une envie de les rendre meilleurs ou de leur donner une seconde chance malgré les difficultés et les désillusions. Cela parle à chacun d’entre nous dans ce que cela raconte des relations amicales, amoureuses, familiales et dans ce que cela met en exergue de l’importance des choix que l’on fait.

Si on a aimé North Bath et ses habitants, on les retrouvera avec plaisir dans cet autre titre de Richard Russo, A malin, malin et demi, qui prend place une dizaine d’années après Un homme presque parfait (mais, petite précision, on peut lire les deux ouvrages indépendamment l’un de l’autre).

Un homme presque parfait – Richard Russo | Traduction de Jean-Luc Piningre, Josette Chicheportiche et Françoise Arnaud-Demir (Editions 10-18 – juillet 2017)

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7 commentaires sur “Un homme presque parfait de Richard Russo

  1. Je ne savais pas qu’il se déroulait avant À malin, malin et demi alors j’aurais acheté le second sans y prendre garde (même si tu dis qu’ils peuvent se lire indépendamment, je préfère suivre l’ordre imposé par les auteurs). J’ai beaucoup aimé Martha’s Vineyard, le dernier roman de Russo, donc je me note de penser à ce titre-ci 🙂

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