Celle qui fut moi de Frédérique Deghelt 

Frédérique Deghelt se fait, l’espace de ce récit, la porte-parole, la prête-plume de Sophia L, actrice célèbre confrontée à la fois à la fin de son mariage et à un divorce compliqué, à l’Alzheimer de sa mère et aux envies d’indépendance de sa fille. C’est d’ailleurs la maladie de sa mère et ses propos qui semblent étranges qui vont mettre Sophia L en quête de son identité. Car il semble que petite fille, Sophia ne cessait d’évoquer sa première mère et une vie qu’elle n’avait pourtant, apparemment, pas vécue. Imagination enfantine ou souvenirs d’une vie antérieure ? Sophia L va partir sur ses propres traces, du Brésil à La Martinique.  

Depuis ma première lecture de Frédérique Deghelt (La grand-mère de Jade), je sais que cette auteure possède une véritable capacité à entrainer son lecteur sur des fausses pistes et des faux-semblants qui s’achèvent par une conclusion souvent surprenante. 

C’est encore le cas ici avec cette quête identitaire d’une femme qui, si elle est connue du monde entier, semble elle-même ignorer sa véritable identité et ce que lui racontent les souvenirs qui remontent à la surface progressivement.  

“Pourtant il me semblait que ces délires de l’au-delà embarquaient l’esprit vers une intelligence inexplorée, une intelligence qui aurait perduré après la vie pour se prolonger dans un autre corps avec toutes ses expériences. C’était quelque chose qu’aucun de nous ne pouvait nommer car nous en étions au stade du doute, d’une recherche, d’une expérimentation polluée par l’ésotérisme, la religion et les croyances diverses et variées de plus de deux mille ans de chrétienté. Tout était indicible, improbable, déjà suggéré dans les récits forgés par les hommes, est presque inconcevable. Pourtant une part de moi éprouvait cette étrangeté de l’Intérieur et je me sentais obligée de l’accepter sans pour autant la comprendre. ” 

Qu’on croit soi-même aux vies antérieures, à la réincarnation, aux réminiscences d’un passé vécu dans une autre époque, on se laissera envoûter par ce texte et pas la quête de Sophia L. Sa rencontre avec Seiji, lui-même écartelé entre sa double origine japonaise et antillaise et à la recherche de sa mère, renforce cette thématique d’une quête d’identité qui permet de se sentir complet en comprenant d’où l’on vient.  

Un fil rouge qui trouve par ailleurs une belle et poétique illustration à travers l’art japonais du Kintsugi qu’exerce Seiji. L’art de la résilience par excellence puisqu’il consiste à réparer des objets cassés en soulignant les brisures avec de l’or. Une technique qui rend l’objet encore plus beau et plus précieux. Et un parallèle évident entre cet art et le besoin de comprendre ce que l’on est et d’où l’on vient pour retrouver son unité et son équilibre en enrichissant sa personnalité de ses expériences passées.  

Et je ne peux conclure sans parler de cette sublime couverture, illustrée par Harshad Marathe, un voyage à elle seule !  

Celle qui fut moi – Frédérique Deghelt (Editions de L’Observatoires – mars 2022)

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