
Le récit s’ouvre sur un homme qui semble être amnésique et qui se trouve dans une église. C’est cet homme qui servira de narrateur et qui accompagnera le lecteur tout au long de ce splendide roman. Dans le village où cet homme se retrouve, sans aucun repère, tous semblent pourtant le connaître. Se retrouvant dans le cimetière, il est attiré par cette inscription : Ton absence n’est que ténèbres. C’est sur cette tombe qu’il rencontre Runa, la fille de la défunte, qui lui conseille de se rendre à l’hôtel que tient sa sœur, Soley.
A partir de là va se déployer un récit d’une ampleur magistrale qui entremêle les histoires des membres d’une famille, du milieu du XIXème siècle à aujourd’hui. Le destin des uns va irrémédiablement avoir des répercussions sur les autres, les choix des ancêtres vont entraîner des conséquences pour leurs descendants. Les vivants et les morts se répondent au cœur d’une fabuleuse mosaïque qui dévoile ses secrets au fil de la lecture.
“Certaines vies semblent si dénuées d’événements notables qu’il est difficile de les décrire. Tout autant que les poteaux d’une clôture. Et pourtant, ce sont ces poteaux qui soutiennent tout.”
Le roman se construit comme un puzzle dont le lecteur ne comprend toutes les imbrications qu’une fois l’ensemble des pièces assemblé. On se laisse totalement submerger par ces destins, happé par la langue et le style si lyrique de Jón Kalman Stefánsson. On passe là par toutes la palettes des émotions, du rire aux larmes, accompagné par les somptueux paysage de l’Islande et cette atmosphère si particulière d’une île où parfois le soleil ne brille jamais.
Si les époques se télescopent et que les personnages sont multiples, l’auteur réussit le tour de force de ne jamais perdre son lecteur au milieu de toutes ces histoires aussi prenantes les unes que les autres. L’amour est omniprésent, heureux ou malheureux, conduisant parfois à faire des choix irrévocables, transcendant tout mais accompagné de ses pendants : la mort, le doute, la jalousie, la perte. Comme l’Islande, le roman alterne des moments de luminosité intenses avec des moments extrêmement sombres.
« J’ignore combien de temps je parviendrai à la retenir ici-bas. C’est que la mort tire bien plus fort que moi pour l’emmener de l’autre côté. En fin de compte, je ne suis pas si costaud. J’ai beau n’avoir jamais tiré aussi fort, je crains de ne pas avoir les muscles qu’il faut. Je crains que ta grand-mère ne soit en train de nous quitter. Et ensuite, je dois t’avouer que je ne sais pas ce qu’il adviendra de ce monde. »
C’est poétique, nostalgique, magnétique, très ambitieux et merveilleusement réussi. Décidément, le talent de Jón Kalman Stefánsson ne se dément pas !
A noter aussi la très belle bande son qui accompagne ce roman, de Bob Dylan à David Bowie en passant par Nick Cave ou Leonard Cohen, des Pixies à Regina Spektor en passant par Tom Waits ou Morrissey. On a presque envie qu’une maison de disque édite cette « Compilation de la Camarde » !
Ton absence n’est que ténèbres – Jón Kalman Stefánsson / Traduction d’Eric Boury (Editions Grasset – janvier 2022)
Il faudra que j’essaie à nouveau car les premières pages ne m’ont pas du tout accrochée
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C’est un auteur que j’aime beaucoup mais je comprends que son style déroute un peu
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en tout cas, votre critique donne envie de le lire
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🙏🏻
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J’ai découvert l’auteur tardivement avec son précédent roman que j’ai énormément aimé. Je me réjouis de lire celui-ci.
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Son précédent m’était tombé des mains, alors je passe mon tour pour celui-ci, malgré ton avis.
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