
Paul est un homme sans beauté, fade, de ceux que les femmes ne regardent pas, qu’elles évitent même, en tous les cas qui n’inspirent pas l’amour. Paul est un homme rempli de rancœur, de rancune. Paul est seul. Mais quand Mylène vient s’installer sur son palier, Paul se prend à rêver. Il parvient à tisser des liens d’amitié puis à créer une véritable proximité avec la jeune femme. Au point de la séduire. Pour une nuit. Une nuit sans lendemain qui brise leur amitié car Mylène coupe tous les ponts avec son voisin. Alors Paul ressasse, Paul attise sa haine. Jusqu’au jour où il rencontre Angélique. Paul tombe amoureux, Angélique cède. Ils vont s’installer ensemble. Mais Paul devient très vite jaloux, méfiant, méchant. Jusqu’à l’irréparable.
Dans ce premier roman Bénédicte Soymier explore les liens d’un couple, faits d’emprise et de soumission. On ne peut pas réellement parler d’amour entre ces deux êtres qui auraient pu se consoler mutuellement de leurs souffrances mais qui, au contraire, s’enfoncent dans une relation destructrice. Paul s’enlise dans une jalousie morbide, se voyant reproduire les gestes de son père, englué dans un passé traumatisant. Angélique s’enferre dans cette relation toxique, elle pour qui l’amour n’a bien souvent consisté qu’à donner son corps à des hommes qui l’ont rejetée.
“Il a oublié le parfum de l’amour, les frissons et l’envie, il ne sait plus, ni dans son corps, ni dans sa tête, ça lui échappe, mais il devine – la boule serrée sous son sternum, gonflée ou dégonflée au rythme des rencontres, la moiteur de ses paumes, les doigts gourds, frottés sur ses cuisses, et son cœur qui palpite, pressions, rétractions, le pouls heurté, au cou et aux poignets, qui file sous les tissus et pulse jusqu’aux oreilles.”
J’ai trouvé très intéressant que l’auteure sonde l’esprit de Paul, qu’elle nous donne à voir de l’intérieur le mécanisme qui le pousse à agir de la sorte et que sans jamais lui trouver d’excuses elle apporte des clés à son tempérament violent qui s’éveille et se déploie tout au long du roman. Très intéressant aussi le fait qu’elle choisisse que ce soit lui qui décide de s’éloigner afin d’essayer de reprendre pied.
Si les personnages n’ont pas éveillé chez moi une grande empathie, l’analyse qui est faite de leurs comportements semble très juste et c’est ce côté décryptage qui a retenu mon attention aussi bien du côté de Paul que du côté d’Angélique.
J’ai parfois été un peu gênée par le côté répétitif de la narration qui parait tourner un peu en rond pour nous raconter les vies de Paul et d’Angélique, mais globalement j’ai trouvé le parti-pris très original et la façon d’arriver à ne pas rendre Paul sympathique tout en permettant au lecteur de le comprendre très réussie.
Le Mal-épris – Bénédicte Soymier (Editions Calmann-Lévy – Janvier 2021)
Le thème a l’air intéressant. Les relations sous emprise sont toujours fascinantes.
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Tu as l’air toutefois un peu déçue.
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Pas déçue non, un peu mitigée sur certains aspects comme je l’explique. Mais pour un premier roman il y a vraiment un style, une voix, un parti pris intéressant.
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