Albert Camus, journaliste de Maria Santos-Sainz

De Camus je connais surtout l’écrivain et l’homme de théâtre. Aussi l’homme amoureux grâce à la publication de sa correspondance avec Maria Casares dont j’ai parlé ici

Je connais sans doute beaucoup moins sa carrière journalistique d’où mon intérêt pour ce livre.  

Maria Santos-Sainz commence par une biographie de quelques pages, pour restituer le contexte et la vie de celui dont cette année marque les 50 ans de la mort. 

Ce qui permet de comprendre que Camus s’est construit à partir d’une infinité d’événements. Un instituteur qui lui fait confiance et qui lui ouvre les portes de la connaissance, une vraie curiosité du monde et de ce qui se passe autour de lui, et puis des rencontres qui vont façonner son destin. 

Camus ne fera pas d’études de journalisme. Il va apprendre et comprendre sur le tas, se forger une certaine idée du journalisme faite d’exigence, d’honnêteté, d’intégrité.   

« Si les écrivains avaient la moindre estime pour leur métier, ils se refuseraient à écrire n’importe où. Mais il faut plaire, paraît-il, et pour plaire, se coucher. Parlons franc : il est difficile apparemment d’attaquer de front ces machines à fabriquer ou à démolir des réputations. Quand une gazette, même ignoble, tire à six cent mille exemplaires, loin de l’offenser, on prie son directeur à dîner. C’est pourtant notre tâche de refuser cette sale complicité. Notre honneur dépend de l’énergie avec laquelle nous refuserons la compromission. » 

La carrière de Camus en tant que journaliste de divise en trois périodes. Tout d’abord à Alger Républicain dans les années 1938-1940 où il débute sa carrière de reporter. Puis entre 1944 et 1947 où il sera rédacteur en chef et éditorialiste du journal Combat. Enfin entre 1955 et 1956, où il est éditorialiste pour l’Express. 

En tant que journaliste, Camus est profondément ancré dans son temps et dans l’histoire, se faisant le porte-voix des plus démunis et prenant résolument parti dans les événements qui jalonnent son siècle. La décolonisation, la guerre mondiale, la guerre d’Algérie, l’exclusion, la pauvreté, le racisme sont autant de sujets sur lesquels il écrira. Quitte à déplaire.  

Les articles de Camus, comme son œuvre, ne peuvent se lire sans les lier à son histoire personnelle. Chez Camus tout fait sens, l’œuvre littéraire répond aux articles qui eux-mêmes font écho à sa vie.  

« Loin de refléter l’état d’esprit du public, la plus grande partie de la presse française ne reflète que l’état d’esprit de ceux qui la font. A une ou deux exceptions près, le ricanement, la gouaille et le scandale forment le fond de notre presse. » 

J’ai trouvé ce livre globalement intéressant mais j’aurais aimé entendre plus la voix d’Albert Camus à travers la reproduction d’articles dans leur intégralité. Or, il y a surtout beaucoup d’extraits, courts, qui ne me semblent pas donner la pleine mesure de la plume journalistique de Camus. De la même manière il y a un certain nombre de paraphrases là où j’aurais aimé lire l’original. 

Et enfin, j’ai été gênée par quelques répétitions dans le texte qui donnent parfois l’impression de tourner en rond. 

Mais l’ensemble reste un éclairage intéressant de Camus et de son rapport au journalisme. De sa profession de foi vis à vis d’un métier dans lequel il s’est engagé avec conviction et qu’il souhaitait exercer en liberté et sans compromission.  

Une belle source d’inspiration à notre époque où la course au sensationnalisme semble parfois primer sur la qualité de l’information et de l’écrit. 

Albert Camus, journaliste – Maria Santos-Sainz (Editions Apogée – mai 2019) 

Livre lu dans le cadre de l’opération #massecritique de Babelio

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5 commentaires sur “Albert Camus, journaliste de Maria Santos-Sainz

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