
Roman lu dans le cadre des #explorateursdelarentreelitteraire de Lecteurs.com
Quelle belle idée de traduire pour la première fois en France un roman de l’auteure chinoise Zhang Yueran.
Ce récit plein de poésie et de nostalgie est extrêmement touchant et les deux personnages qui portent cette histoire sont magnifiquement incarnés.
Le livre fait alterner les interventions de Li Jiaqi et de Cheng Gong. La première revient de Pékin pour assister aux derniers jours de son grand-père. Le second n’a jamais quitté leur village où il vit avec sa tante. Le récit les présente au moment où les deux amis d’enfance se retrouvent. Commence alors une longue conversation en va et vient entre les deux personnages, un échange durant lequel ils reviennent sur leur enfance mais aussi sur toutes ces années qu’ils ont vécu loin l’un de l’autre.
La relation entre Li Jiaqi et Cheng Gong est évidemment au centre du livre. Une relation qui s’est construite, on le comprend très vite, sur la solitude que ressentaient les deux enfants à l’époque. Mais aussi sur un effroyable secret qui relie les deux familles et qui prend sa source lors de la Révolution culturelle lancée en 1966. Un secret dans lequel le clou du titre joue un rôle essentiel.
Leurs vies d’enfants, même s’ils ne sont pas issus des mêmes milieux sociaux, sont très similaires. Élevés par leurs grands-parents, privés de l’amour de leurs parents, rêveurs et solitaires, ces deux âmes ne pouvaient que se rejoindre. Ils m’ont particulièrement touchée par leur soif d’amour qui se retrouve même dans leur vie chaotique d’adulte.
Leurs façons de jouer ensemble lorsqu’ils étaient enfants, aussi étranges qu’elles puissent être, m’ont aussi amusée. Quels enfants passent leurs après-midis à l’hôpital auprès du grand-père de l’un d’eux qui est dans le coma et l’utilisent comme accessoire de jeu ?
Tout n’est évidemment pas de cet ordre dans le roman. Et cette anecdote raconte surtout l’immense solitude de ces deux enfants, leurs états d’âme et leur immense fragilité face au monde des adultes peuplé de non-dits.
Tout au long du roman leurs souvenirs se répondent au fil des chapitres, ils reviennent aussi sur leur vie d’adulte pour combler les trous de ce qu’ils ne savent pas l’un de l’autre. Cet échange est sans doute pour eux l’occasion de fermer la porte d’un passé douloureux pour pouvoir enfin avancer et se pardonner.
« Un jour, dans le massif de renoncules derrière la bibliothèque, tu m’as demandé quelle était l’odeur d’un secret. J’ai répondu qu’elle était sucrée, comme un melon mûr qui se fendille. Par cette soirée de printemps, le parfum du secret était là. Dangereux et ancien, associé dans mon esprit à une sorte de magma ou de météorite. En tout cas, il n’était pas sucré. J’ai eu envie de courir vers toi pour te le dire, en vain. »
Ce roman puissant est aussi l’occasion pour moi de mieux connaître la vie de la Chine à la fin du XXème siècle et l’évolution de ce pays.
Zhang Yueran signe là un roman profond et ultrasensible, plein de mélancolie. Il s’agit pour moi d’une véritable rencontre et d’un coup de cœur. J’attends maintenant avec impatience les précédents romans de cette auteure, avec peut-être une traduction de Dominique Magny-Roux dont le travail me semble rendre parfaitement justice au texte de Zhang Yueran.
Le Clou – Zhang Yueran (Editions Zulma – août 2019)
Un roman qui a beaucoup plu à ton magnifique chat !
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😀 elle a les mêmes coups de cœur que moi
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